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ANI-MOT-LIRE
16 février 2006

CONCLUSIONS / METHODES DE LECTURE

Conclusions quant aux méthodes de lecture.

Quelques précisions quant à l'appellation "méthode globale":
A l'origine la "méthode globale de Decroly" avait pour principe de partir du vécu des enfants et du groupe pour élaborer des textes et les faire ensuite lire et analyser par les enfants, "manipuler" par découpage par exemple de mots ou de parties de mots, dans le but de composer de nouveaux mots et de nouveaux textes. Cette métode à départ global était analytique puis synthétique. Il en est de même de la méthode naturelle de Freinet qui s'en est inspirée.
Il semble qu'aujourd'hui tout cela ait été oublié et la méthode globale dont on entend parler actuellement semble, pour des raisons idéologiques et pour ses détracteurs, n'être qu'une appréhension visuelle globale des mots, leur mémorisation et un jeu de devinettes. Cette façon de voir la méthode globale, je l'appellerai "méthode globale non analytique", pour clarifier le problème. Elle est pour certains responsable de tous les maux, bien qu'elle n'ait été que très peu appliquée telle qu'elle. Dans les méthodes mixtes, les plus usitées, quelques très courts textes et quelques mots appréhendés globalement au début, sont très vite analysés en terme de mots, de  syllabes, et de graphèmes associés aux phonèmes correspondants.   

Les querelles de méthodes sont inutiles.

Si l’on a pu penser que lire consistait uniquement à établir une relation entre des phonèmes et des graphèmes, on constate qu’il n’en est rien, puisqu’en tout début d’apprentissage l’enfant n’établit pas de correspondance grapho-phonologique. Sa lecture est d’abord logographique : à un ensemble graphique, il fait correspondre un ensemble sonore, porteur de sens. Puis, lorsqu’il opère une analyse des mots, celle-ci n’est encore au stade présyllabique que d’ordre visuel.

Il ne saurait être question d’appliquer une "méthode globale non analytique", où l’appréhension globale des mots n’aboutirait qu’à de multiples confusions entre des mots morphologiquement proches, et qui maintiendrait les enfants au premier stade de l’apprentissage, le stade présyllabique. (Voir « La ligne évolutive en lecture-écriture »). Mais garder l'esprit de Decroly, partir de mots importants affectivement pour les enfants et les "manipuler" matériellement grâce à des jeux de lecture et d'écriture (les jeux ANI-MOT-LIRE), et intellectuellement grâce à l'Ardoise à lire, est une tout autre affaire.
Les discriminations perceptives sont nécessaires à la spécialisation de l’aire cérébrale servant à l’analyse visuelle des mots (Voir apport de l'IRM).
Seule une analyse visuelle et auditive de l’écrit permettra de progresser vers les stades suivants. Les enfants ne peuvent pour la plupart opérer seuls cette analyse, le rôle de l’enseignant est de les y aider.

Le premier découpage de la chaîne parlée et du code écrit s’opère au niveau des syllabes. C'est à ce stade là que les enfants commencent à établir une correspondance entre parties graphiques et parties sonores des mots, elle se fait au niveau des syllabes. Dans le même temps, ils commencent à entendre les sons des voyelles, la première correspondance grapho-phonologique se fait au niveau des voyelles. Ce sont les stades syllabique et syllabico-alphabétique (rien à voir avec la méthode syllabique).

Faire parcourir à tous les enfants ces premiers stades doit être l'objectif de l'école maternelle.
Afin de faire progresser les enfants d’un stade à l’autre, le rôle de l’enseignant, à la maternelle, est de les mettre systématiquement et méthodiquement, en situation de lectures variées, les amenant à opérer la mise en correspondance de l’oral et de l’écrit et l’analyse visuelle et auditive des mots.
   
Les enfants commencent ainsi peu à peu à entendre les sons des consonnes, la correspondance grapho-phonologique s'établit au niveau des consonnes.
Le troisième stade, le stade alphabétique, correspond à une lecture grapho-phonologique C’est là que doit se situer la méthode syllabique, la combinatoire, appelée communément le B.A.-BA qui leur permet de combiner consonnes et voyelles (les voyelles simples au début, les digrammes et trigrammes ensuite). C'est l'affaire du CP.
En fait il s'agirait d'employer de préférence une méthode phonique, basée sur la combinaison des phonèmes, pour lire des syllabes complexes (consonne-voyelle-consonne comme dans "coq", consonne-consonne-voyelle comme la première syllabe de "dragon", ou consonne-consonne-voyelle-consonne comme au début de "scorpion"...). D'ailleurs le fait de découvrir peu à peu les correspondances entre les lettres (voyelles puis consonnes) et les sons permet une lecture de type phonique, si nécessaire.
Dans un système alphabétique comme le nôtre la mise en correspondance des graphèmes et des phonèmes est indispensable, mais la méthode syllabique ne peut être efficace qu'à condition que l'on ne fasse pas que cela, que l'on ne commence pas par là et que l'on n'en reste pas là.
Elle doit s'accompagner de la recherche du sens, de la construction du récit, à travers les images successives des albums, à travers les histoires lues par l'adulte, à travers les premières lectures des enfants. Elle doit s'accompagner d'un travail d'écriture llié à la lecture et qui n'est pas copie de mots connus simples, mais réel cheminement pour l'acquisition et la mémorisation de l'orthographe des mots.

La méthode syllabique est très abstraite. Elle ne peut convenir qu'à des enfants qui ont accompli, grâce à leur entourage ou à l'école maternelle, le cheminement préalable de compréhension du sens de l'écrit, qui ont cherché à entrer dans l'écrit et à l'analyser, à comparer, à déduire, à généraliser... Elle ne peut être appliquée à des enfants qui n'ont pas suffisamment développé leur langage parlé, ou n'ont pas eu un rapport assez fréquent aux livres et au langage de l'écrit.
Pour "faire sens", la méthode syllabique, caractérisée par l'apprentissage des correspondances grapho-phonologiques, ne doit intervenir qu'après:
- que les enfants ont eu plaisir à entendre de nombreuses histoires lues par l'adulte
- qu'ils se sont familiarisés avec les livres, et ont cherché à comprendre le langage de l'écrit
- qu'ils ont cherché à donner une signification aux mots 
- qu'ils ont "joué" avec les signes écrits et avec les sons de la langue.
La méthode syllabique doit être précédée en grande section d'école maternelle par tout le travail d'analyse visuelle et auditive des mots, qui facilitera au CP la synthèse de tous les éléments constitutifs des mots vus précédemment. Ce travail d'analyse se fait le plus souvent spontanément au cours des échanges entre l'enfant et son environnement. Mais dans environ 20% des cas l'apport du milieu est insuffisant. C'est donc l'école maternelle qui doit pallier cette carence. On considère à tort que ce moment particulier ne fait pas partie de l'apprentissage alors qu'il est essentiel.
Les activités d’émissions d’hypothèses sur le sens de l’écrit, de prises d’indices variés, de discrimination, d’identification, de mémorisation et d’anticipation, de comparaison, de déduction, de généralisation… qui sont pratiquées par les enfants en même temps que l’analyse visuelle des mots, sont essentielles. Toutes les connaissances, notions et savoir-faire utilisés en début d'apprentissage pourront être réinvestis aux autres stades de l'apprentissage.

Il ne s’agit pas d’en rester au simple déchiffrage, à la lecture de type combinatoire ou B.A-BA. Oraliser n'est pas une fin en soi. La compréhension ne naît pas toujours de l'oralisation, seulement  dans des mots ou phrases simples dont le sens est évident, comme c'est souvent le cas dans les manuels de lecture, qui repoussent à plus tard l'entrée dans la complexité et dans la recherche et la construction du sens.
Cette recherche de sens doit se faire dès le début et doit se poursuivre tout au long de l'apprentissage, au détour de mots, de phrases et de textes de plus en plus longs et complexes, sur des textes ou histoires d'abord lus par l'adulte, puis lors de lectures  dont le sens est d'abord à rechercher ensemble, enfin au cours de lectures personnelles,  ceci pour permettre de faire un tour d'horizon complet de tout ce qui peut "faire sens" et non pas considérer implicitement que c'est à la portée de tous.

Tout le chemin menant à la lecture de type orthographique, au quatrième stade, reste à parcourir. A ce stade-là il y a identification et accès direct à la signification d’un certain nombre de mots; la lecture des mots moins fréquemment rencontrés se fait syllabes par syllabes et la lecture combinatoire, avec correspondances graphèmes-phonèmes est de plus en plus rare, elle ne s’applique plus qu’à des mots longs et de structure complexe. L’identification des mots renvoie à leur signification immédiate. C’est la lecture experte, à laquelle on ne parvient qu’en fin de parcours. C'est là que l'approche idéo-visuelle de la lecture est intéressante, du fait qu'elle prend en compte toute la richesse et la complexité de l'écrit.
Pour en arriver là, il faut de nombreuses occasions de lecture et d'écriture, vraies, variées et motivantes, qui permettent de se constituer un important capital de mots en mémoire, mots connus oralement, connus à l'écrit et signifiants. La lecture n'est pas simplement technique, elle est intellectuelle, culturelle et sociale et c'est tous ces aspects de l'écrit qu'il faut faire découvrir dès le début, dès la maternelle et tout au long de l'apprentissage.

Dans la progression, la ligne évolutive en lecture-écriture montre que:
- entre la lecture de type logographique à la lecture grapho-phonologique se situe toute la phase d'ANALYSE.
- entre la lecture de type grapho-phonologique et la lecture orthographique se situe toute la phase de SYNTHESE.
De plus, il y a SYMETRIE entre:
- les activités d'ANALYSE des phrases, des mots, aux syllabes puis aux lettres et aux sons  correspondants, dans les premiers stades
-
et les activités de SYNTHESE des lettres aux sons et aux syllabes pour aboutir aux mots au stade alphabétique au moment de la combinatoire; et de synthèse des syllabes, des mots, des phrases et des textes et de leur organisation, lors de la lecture orthographique.
Toutes les compétences développées durant la phase d'analyse peuvent être réinvesties en synthèse et donc en lecture, elles seront également utiles en écriture.

Une autre manière de faire:
La découverte progressive par les enfants du fonctionnement de notre système de lecture-écriture grâce à la participation active de tous à cette recherche (à son analyse puis à sa synthèse) et grâce à l'utilisation de l’Ardoise à lire. Cet outil permet aux enfants de construire ensemble la réponse à une question (mot écrit, sens de la phrase...) qui se pose au groupe tout entier. Chacun a droit à la parole; tout apport même minime compte, car la solution naît de la participation de chacun selon le niveau qui est le sien; toute proposition demande à être expliquée, pour montrer qu’elle n’est pas fortuite mais réfléchie, qu’elle s’appuie sur des connaissances et des notions précises, mais aussi pour montrer qu’il peut y avoir différentes manières de s’y prendre, ce qui peut amener à la découverte et à l’utilisation de nouvelles stratégies.
C’est ainsi que la structure même des mots et de l’écrit apparaît aux enfants dans toute sa complexité, et qu’ils ont, la possibilité de mieux comprendre le fonctionnement même de notre système de lecture-écriture dans toute sa richesse.

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